Anouschka Steioff, assistante sociale de la Fondation Autisme Luxembourg : „Tant que la personne concernée s’accepte comme elle est, nous pouvons adapter tout le reste autour de cela.“.
Dans le cadre de ses 25 ans d’existence, que notre Fondation Autisme Luxembourg (FAL) fête cette année, nous voulons familiariser la société avec le spectre de l’autisme au sens large. Pour cela, nous portons mensuellement notre attention sur un autre domaine de la vie. Tout au long de l’année nous discutons avec des personnes concernées de leurs expériences propres et nous approfondissons le sujet par des entretiens factuels avec des experts de notre Fondation.
Après avoir observé le mois dernier comment les personnes sur le spectre autistique conçoivent les relations sentimentales, nous dirigeons ce mois-ci notre attention sur l’aide apportée aux familles concernées. Comme nous l’avons déjà vu avec les deux premiers thèmes, chaque personne sur le spectre autistique est à considérer comme un individu unique. Et tout comme chaque personne est unique, les problèmes pour lesquels elle a besoin de soutien le sont également.
Le service Soutien de la FAL vient en aide aux personnes concernées, mais aussi à leurs familles, dans tous les domaines de la vie. Dans ce cadre, l’équipe adapte ses différentes formes de soutien aux demandes et besoins individuels des familles.
Pour se rendre compte à quel point un tel soutien peut varier, nous avons rencontré différentes familles qui sont accompagnées par notre service Soutien. De plus, Gerardina et Anouschka, deux collègues de l’équipe de ce service, nous ont offert un aperçu des divers aspects de leur travail.
Corinne : „Toute notre famille peut mieux s’adapter à Robyn grâce à cette formation. “
Corinne est la maman de Robyn, un garçon de 5 ans avec un Trouble du Spectre Autistique (TSA). Pour pouvoir encore mieux répondre à l’autisme de Robyn dans le cadre de son développement, elle s’est décidée à participer à la formation „Early Bird“. Une formation adaptée pour les parents d’enfants avec autisme et qui lui a été proposée par la FAL.
FAL : Comment décririez-vous, avec vos propres, mots cette formation ?
Corinne : La formation propose aux parents un programme pour une meilleure compréhension de l’autisme, ainsi que des conseils et stratégies concrets, non seulement pour aider l’enfant avec autisme, mais aussi pour améliorer le quotidien de tous les membres de la famille. Le cursus se tient sur une durée de 3 mois et est divisé en 8 cours, pendant lesquels des idées théoriques sont mises en pratique
FAL : Qu’est-ce que cette formation a apporté concrètement à votre vie de famille ?
Corinne : En parallèle à une meilleure compréhension de l’autisme, la formation m’a aussi aidé à pouvoir mieux m’adapter à Robyn et à appliquer des stratégies concrètes au quotidien.
De plus, cela a énormément renforcé ma confiance en moi en tant que mère, en sachant que je pouvais désormais aider Robyn de manière proactive.
Vu que j’ai également pu donner des idées concrètes aux frères et soeurs de Robyn, ainsi qu’à son père, qui permettent de mieux aider Robyn au quotidien, toute la famille a pu mieux s’adapter à ses besoins spécifiques, ce qui l’a aidé à mieux s’affirmer. Ce n’est que quand les parents savent exactement comment ils peuvent s’adapter à l’enfant avec autisme que l’enfant peut faire des progrès concrets.
FAL : A quel point l’échange avec les autres familles est-il une aide ?
Corinne : Cette formation est très certainement une bonne opportunité pour encourager l’échange entre les familles concernées. Le fait de pouvoir discuter et analyser des situations particulières et de pouvoir ensuite trouver ensemble des solutions permet de se sentir moins seul. Et même si Internet offre beaucoup de connaissances précieuses, rien ne vaut l’échange humain.
FAL : Recommanderiez-vous la formation ?
Corinne : Oui, absolument. Cette formation est une „boîte à outils“ précieuse, avec des méthodes et stratégies efficaces, que l’on peut très facilement appliquer dans la vie de famille au quotidien. Tout comme chaque enfant avec autisme est unique, tout aussi uniques peuvent être les situations spécifiques dans la vie quotidienne d’une famille, pour lesquelles il faut trouver une solution. Pour cette raison, il ne peut qu’être utile de participer à une formation lors de laquelle on peut se pencher sur ces différentes situations.
David : „Un grand MERCI au service soutien. »
Cela fait déjà près de 2 ans que David, qui avait déjà partagé ses expériences concernant les deux premiers thèmes, reçoit régulièrement un soutien de la part de la Fondation. En janvier 2021, il a par ailleurs été ravi de pouvoir trouver un emploi au sein de la FAL.
FAL : Dans quels domaines le service soutien t’a t’il déjà offert une aide ?
David : J’ai eu mon premier contact avec le service soutien en 2019, après avoir reçu mon diagnostic auprès de la FAL.
A l‘époque je n’allais pas bien du tout d’un point de vue psychique. Comme je luttais avec une dépression et que j’étais sans emploi, le service soutien m’a tout d’abord apporté un aide psychologique. De plus, ils m’ont motivé à me trouver des occupations, malgré le chômage, et à structurer mes journées. Dans ce but, ils m’ont par exemple motivé à m’inscrire à des cours en ligne et à effectuer un bénévolat au sein du service communication de la FAL.
Je participe également à leur „Groupe de Compétences Sociales“, au cours duquel nous rencontrons assez régulièrement des personnes de l’équipe soutien ainsi que d’autres personnes concernées, afin d’avoir des échanges réguliers. Ceci m’a beaucoup aidé à retrouver une vie sociale active, vu que j’ai eu, depuis toujours, des difficultés dans le domaine social.
Par ailleurs, cela a permis à ma mère de pouvoir prendre, au besoin, contact avec l’équipe, comme par exemple pour obtenir des conseils pour faciliter une cohabitation plus harmonieuse.
Ce qui m’a aussi aidé, c’est tout simplement de savoir qu’à tout moment, dans toute situation, je pouvais me tourner vers eux, et qu’il y avait toujours quelqu’un qui pouvait m’écouter et m’apporter une aide.
FAL : Et ensuite tu as trouvé ton nouvel emploi auprès de la FAL.
David : Tout à fait. C’est certainement le domaine dans lequel ils ont pu m’aider le plus, en fin de compte. A l’époque où j’étais encore sans emploi, j’ai pu compter sur le soutien de l’assistante sociale du service concernant les relations avec l’ADEM, ainsi qu’obtenir des renseignements concernant le Fonds National de Solidarité (FNS).
Quand j’ai appris il y a quelques mois que la FAL envisageait d’embaucher de nouvelles personnes Asperger, ils m’ont aidé à trouver un travail adapté à ma situation auprès de la FAL.
Depuis, je bénéficie d’un petit „Suivi au travail“, pour voir ensemble, si je me suis bien acclimaté et si je ne rencontre pas de soucis importants au travail.
FAL : Est-ce que tu aimerais encore partager quelque chose.
David : Je tiens à remercier chaleureusement le service soutien pour tout ce qu’ils ont déjà fait pour m’aider depuis tout ce temps. J’aimerais aussi encore une fois souligner à quel point leur travail est important pour les familles concernées, ainsi que la très haute qualité du travail fourni. Ils apportent une grande aide aux familles dans tous les domaines, et ils s’adaptent toujours entièrement à la situation. Donc vraiment, un grand merci et un grand bravo à toute l’équipe !
Rosalba : „Le fait de savoir que quelqu’un est là, m’apporte moralement une grande aide pour surmonter diverses situations. “
Rosalba est la maman de deux garçons, dont l’un est sur le spectre de l’autisme. Simone est âgé de 20 ans et a reçu en 2012 un diagnostic du Trouble du Spectre Autistique. Rosalba fait régulièrement appel au service soutien pour obtenir une aide morale. De plus, Simone profite une fois par mois des lits de répit de la FAL et devrait bientôt commencer à participer deux fois par semaine au Service d’Activités de Jour.
FAL : De quelle manière le service soutien vous aide t-il à maîtriser le quotidien avec Simone ?
Rosalba : J’ai eu mon premier contact avec le service soutien en 2012, après que Simone ait reçu son diagnostic d’autisme. A partir de ce moment, l’on nous a proposé un soutien individualisé, ce qui veut dire qu’une fois par an, une personne du service nous rend visite à domicile et discute avec moi de situations spécifiques, pour lesquelles nous cherchons ensuite ensemble des solutions, afin d’améliorer le quotidien de Simone. Mis à part ces visites à domicile, j’ai un contact régulier avec le service et je peux les joindre à tout moment par téléphone.
Il y a 3 ans, Simone, était pris en charge au sein d’une autre institution. Il y a subi une expérience traumatisante qui a eu pour conséquence que, depuis 3 ans, il a une énorme peur de quitter la maison. Cela signifie que je suis pratiquement obligée de toujours rester à la maison avec lui.
Je pense quil n’est pas nécessaire que je vous explique plus en détail pourquoi cela peut être extrêmement fatigant, et à quel point cela exige de moi une force énorme. Mais, le fait de savoir que je peux à tout moment me tourner vers une personne de l’équipe m’apporte moralement une grande aide pour surmonter diverses situations. Bien plus que je ne saurais le dire.
FAL : Simone fait aussi régulièrement usage du lit de répit de la FAL. De quelle manière cela aide-t-il votre vie de famille ?
Rosalba : Tout à fait. Nous avons décidé il y a près d’un an de confier Simone une fois par mois pour tout un weekend au lit de répit de la FAL. Ceci en première ligne pour le bien-être de son frère.
Vous devez comprendre que, lorsqu’on a un enfant avec autisme et un autre enfant sans autisme, l’enfant sans autisme est malheureusement toujours un peu négligé. Non pas parce qu’on veut favoriser un enfant, mais tout simplement parce que l’enfant avec autisme a besoin de plus d’attention.
Naturellement, cela me fait très mal en tant que mère de voir que le frère de Simone n’a pas d’autre choix que de l’accepter. Et surtout de voir que c’est entretemps déjà devenu normal pour lui que sa mère soit trop fatiguée le soir pour également écouter ses problèmes à lui.
Au cours de ce weekend mensuel que Simone passe auprès de la FAL, nous pouvons entièrement nous concentrer, en tant que parents, sur son frère et lui offrir l’attention qu’il mérite.
FAL : Que souhaitez-vous pour Simone et pour votre vie personnelle ?
Rosalba : Récemment, nous avons reçu la bonne nouvelle de la part de la Fondation qu’ils ont une place disponible deux fois par semaine pour encadrer Simone au sein de leur Service d’Activités de Jour.
Hélas, la première tentative a échoué. Il devait s’y rendre pour la première fois, mais il avait à nouveau trop peur de quitter son environnement familier.
Je souhaite vraiment que nous arrivions à lui ôter cette peur à l’avenir, et que nous parvenions à l’encourager à profiter de ce Service d’Activités de Jour. Je suis convaincue, bien qu’il ait peur pour le moment, que ce n’est que pour son bien. Je sais qu’il y serait bien encadré et qu’il pourrait enfin recommencer à prendre part à une vie sociale en participant à des activités qui lui plaisent avec des personnes dans la même situation que lui.
De plus, cela améliorerait bien entendu aussi ma vie personnelle, puisque deux jours par semaine j’aurais du temps pour moi, et pourrais ainsi reprendre des forces.
„Il nous est important de faire comprendre aux familles concernées qu’elles peuvent venir vers nous à tout moment et avec tout problème.“
Anouschka Steioff est assistante sociale, avec corps et âme. Gerardina Blasetti a fait de son hobby, aider les autres à l’aide de la psychologie, son métier. Elles travaillent main dans la main au sein de notre service soutien.
Comme elles me l’ont raconté, il n’y a pas de journée de travail „typique“ au sein de leur service : „Nos journées diffèrent autant les unes des autre que les demandes et besoins individuels des familles dont nous nous occupons. Il nous est avant tout important de vraiment adapter nos possibilités de soutien de manière individuelle aux situations spécifiques, dans lesquelles les familles concernées se trouvent actuellement. Et ceci peut vraiment aller dans toutes les directions. Bien que cela aide déjà beaucoup de personnes de simplement pouvoir nous parler par téléphone et de pouvoir recevoir divers conseils de notre part, d’autres personnes ont besoin d’un suivi régulier avec des rencontres personnelles. La seule chose que nous ne pouvons pas proposer, en revanche, est une véritable thérapie sur le long terme. Cependant, nous les orientons alors avec plaisir vers une psychologue externe à la Fondation“, nous dit Anouschka.
De plus, toutes deux nous ont fait part qu’elles ne proposent pas uniquement des explications et conseils théoriques aux personnes concernées, mais également des exercices pratiques orientés vers le quotidien : „Il nous est important de pouvoir aider les personnes concernées de manière pratique, afin qu’elles aient quelque chose qu’elles puissent utiliser dans leur vie quotidienne, quand nous ne sommes pas là. Si l’on prend par exemple le thème de l’amitié, souvent un grand problème pour les concernés. Tout d’abord, il s’agit d’analyser et d’expliquer le thème du point de vue théorique. Qu’est-ce que l’amitié, quels types d’amitié différents existent et quand suis-je ami avec quelqu’un ? Une fois que le concept de l’amitié a été compris, on passe à la mise en pratique : où puis-je trouver des amis et comment dois-je m’y prendre, étape par étape, pour constuire une bonne amitié avec une autre personne ? Nous pouvons ensuite très facilement travailler cela avec de petits exercices de mise en situation! “ nous décrit Gerardina.
Cependant, elles sont toutes les deux d’accord que ce n’est pas toujours facile de maintenir la distance nécessaire face aux situations vécues : „Je pense que je parle pour nous deux en disant que nous faisons vraiment notre métier par passion. Cela dit, nous sommes confrontées à toutes les émotions lors de notre journée au travail : d’un grand sentiment de bonheur, quand on voit à quel point on a pu aider une famille dans une situation particulière, jusqu’à une grande frustration, quand on ne dispose pas des moyens nécessaires pour faire le minimum. Hélas, nous avons également souvent le problème que les gens ne se manifestent que lorsque la situation s’est déjà à fortement dégradée et que nous ne pouvons plus faire grand-chose. Dans ces situations, le soutien mutuel au sein de l’équipe est important pour essayer de conserver une certaine distance. Sinon, le travail rentre avec nous le soir à la maison…“, nous dit encore Gerardina.
„Exactement. Pour cette raison, il est important pour nous de faire comprendre aux familles qu’elles peuvent nous contacter à tout moment, même si elles ne pensent pas que nous pourrons les aider dans une telle situation. Dans le pire des cas, nous les orientons alors vers le service compétent. De plus, nous essayons de toujours encourager les personnes concernées à s’accepter telles qu’elles sont. Ni différentes, ni plus mauvaises, ni meilleures que les autres ! Et accepter qu’elles ont simplement une autre façon de réfléchir et d’agir. Une fois qu’elles s’acceptent comme elles sont, nous pouvons adapter tout le reste autour de cela. “ nous assure Anouschka.
Infobox :
Le service Soutien de la FAL est accessible à toute personne qui vit ou cotise au Luxembourg, et qui a un diagnostic de Trouble du Spectre Autistique, ainsi que pour leurs famille et entourage.
Les familles qui aimeraient profiter de ce service peuvent utiliser le numéro de téléphone 26 91 11 – 1 ou l’adresse mail soutien@fal.lu pour nous contacter. Toute l’équipe fait de son mieux pour se tenir à disposition des familles à tout moment pour toute question ou besoin spécifique.
Les frais du service Soutien sont pris en charge par le Ministère de la Famille, de l'Intégration et à la Grande Région (MIFA) et sont donc gratuits pour les familles.
Appel aux familles :
Toutes les personnes sur le spectre autistique et leurs familles peuvent avoir des problèmes très diversifiés. Pour cette raison, il est très important pour la FAL d’adapter l’évolution ainsi que le développement de ses services existants aux besoins individuels des familles concernées. Si vous deviez avoir un besoin spécifique, n’hésitez pas à prendre contact avec nous.
Soyez à nouveau présents en avril, quand notre attention se portera sur les symptômes et le diagnostic de l’autisme.